On s'est longtemps inquiété d'éventuelles carences en vitamine PP (Niacine ou B3), calcium, vitamine D... Il n'y a en fait pas lieu, comme on va le voir. Le problème qui peut vraiment se poser est celui de la carence possible en vitamine B 12. C'est pourquoi je m'étendrais davantage sur ce sujet.
Classiquement, les diététiciens recommandent de consommer aux trois repas des céréales (pain, riz, pâtes, maïs, sarrasin, muesli...) avec soit des légumineuses (soja sous toutes ses formes, du lait à la galette en passant par le yaourt, la sauce ou le tofu, pois, lentilles, haricots, cacahuètes...), soit des oléagineux (noisettes, amandes, sésame...). Et vantent les repas traditionnels indiens (riz et lentilles), mexicains (maïs et haricots rouges), africains (semoule et pois chiches en Afrique du Nord, sorgho et purée d'arachides en Afrique noire). Cette combinaison permettrait d'obtenir ensemble les huit acides aminés constituant les protéines (les céréales n'en ont que sept, les légumineuses et oléagineux d'autres, ils se complètent). Ce principe est remis en cause depuis 1993 par l'Association américaine de diététique, constatant d'abord que les acides aminés de l'alimentation se combinent avec ceux fabriqués par le corps, ensuite que le soja à lui seul peut servir de base protéinique. Il est également probable que la majorité des Occidentaux souffre davantage d'un abus de protéines que de carences.
La vitamine PP (Niacine ou B3) se trouve dans les céréales complètes (pain complet, riz complet...), les dattes, figues et amandes.
La bêtacarotène, qui se convertit dans l'organisme en vitamine A, se trouve dans les carottes, épinards, persil, cresson, patates douces, abricots secs et mangues.
Le calcium se trouve dans les légumes verts feuillus, les graines et oléagineux, l'eau calcaire, la mélasse noire, les figues sèches, la farine de soja, les brocolis, les haricots blancs, certaines eaux minérales (Contrex ®, Quézac ®, Valvert ®...), l'algue aziki (qui contient 14 fois plus de calcium que le lait) et tous les produits "enrichis en calcium" (comme beaucoup de soja et tofu).
La vitamine D se trouve en petite quantité dans les champignons, mais provient pour l'essentiel de l'exposition au soleil (nécessaire pour les carnivores comme pour les autres, sans distinction !). Pour les peaux claires, une exposition du visage et des mains environ quinze minutes l'été et une heure l'hiver deux à trois fois par semaine suffirait. Il s'agit d'une hygiène de vie de toute façon recommandable ! Plus les peaux sont foncées, plus le temps d'exposition doit augmenter. En cas de carence, si on doit en consommer en apport supplémentaire, attention : la vitamine D3 (cholécalciférol) est d'origine animale. Seule la vitamine D2 (ergocalciférol) est d'origine synthétique.
Le fer d'origine végétale se trouve dans les fruits secs, céréales complètes, oléagineux, légumes verts feuillus, graines, légumineuses, mélasse noire et dans l'utilisation de plats en fonte (pour les résidus qui s'en dégagent). Pour qu'il soit aussi bien assimilé par l'organisme que le fer d'origine animale, il est nécessaire de l'associer à de la vitamine C ou acide ascorbique (kiwis, chou cru, pommes de terre, légumes verts feuillus, poivrons verts, mûres, mangues, agrumes, tomates), de l'acide malique (pommes, citrouilles, prunes) ou de l'acide citrique (agrumes). Il est moins bien assimilé quand il est associé à du tannin. Le tannin (ou tanin; à ne pas confondre avec le tahin !) se trouve dans le thé, le café, le vin...
En fait, le principe absolu à retenir est de manger le plus de choses différentes possibles : fruits variés, légumes variés, céréales, légumineuses, oléagineux, graines, algues... Souvent les végétariens et végétaliens se soucient bien plus que les carnivores de cette règle de diversité et bénéficient des lors d'un régime beaucoup plus équilibré.
La vitamine B 12 (cobalamine) demande à être étudiée plus en détail. Il s'agit d'une molécule synthétisée par des micro-organismes, des bactéries vivant dans le sol et le système digestif. Le problème de cette vitamine est son assimilation. Il peut y avoir problèmes d'assimilation pour des motifs très variés. En effet, elle se conjugue mal avec le tabac, le sucre blanc, l'alcool, le café, les contraceptifs oraux, l'aspirine, les laxatifs, les antibiotiques, les somnifères, les médicaments traitant l'épilepsie, un taux élevé de cholestérol, une insuffisance d'acidité gastrique, une alimentation trop riche en protéines, gras animal ou aliments cuits, manque de B6 ou de fer, désordres de la thyroïde, maladie de Crohn, stress physique et psychique, trop forte dose de vitamine C (+ 500 mg par jour) ou tout simplement pancréas et foie l'assimilant mal ! On voit que les carnivores ne sont pas à l'abri d'une carence ! Encore une fois, les végétaliens se préoccupant davantage de leur éventuel manque de B12 sont sans doute plus protégés que des carnivores ignorant leur carence !
Pour autant, et fort heureusement, l'organisme a besoin de très peu de B12 et sait généralement la produire lui-même ou au moins la stocker longtemps. Une analyse tous les deux ans par exemple devrait suffire à rassurer. Il faut néanmoins savoir que, contrairement à ce que l'on a cru, la B12 contenue dans les algues, le soja ou certains champignons n'est pas assez bien assimilée par l'organisme humain et ne peut pas résoudre une éventuelle carence. De ce point de vue, les récents guides d'alimentation végétarienne se trouvant dans les magasins de livres à bon marché ne mentent pas vraiment, mais demandent à être explicités : quant ils déclarent que "les graines et les produits dérivés du soja contiennent aussi de la vitamine B12", ils devraient se montrer plus précis. Le seul soja fiable en apport de B12 est celui qui aura été supplémenté.
En effet, la vitamine B12 se fabrique alors à partir de souches bactériennes cultivées sur un milieu aqueux stérilisé contenant les nutriments nécessaires (carbone, azote, sel, minéraux, cobalt, etc) et est utilisée ensuite comme apport fiable de divers produits d'alimentation et enrichir les substrats de développement de certaines levures alimentaires. Toutes les levures alimentaires indiquant de forts taux de B12 ne sont pas fiables : encore faut-il que cette B12, pour être assimilable, ait été cultivée sur un milieu enrichi en B 12. Or actuellement, en France, ce renseignement n'apparaît pas sur les produits. Je tiens ces précisions d' André Méry de l'Alliance Végétarienne, à qui j'emprunte aussi une petite liste de produits complétés en B12 fiable : Yaourt au soja Céréales et fruits Sojasun ®, Pain aux six céréales Turner ®, beaucoup de produits Kellog's ® (corn flakes), beaucoup de produits Nestlé Fitness ®, Supplex-cao ®, Supplex-café ®, Tonimalt ®, Ovomaltine ®, Lait aux amandes instantané "Lactamande" ®, Boisson aux plantes Floradix "Fer + plantes" de l'Abbaye des Sept-Fons ®, Germalt et Germacao ®, le gel de froment complet Dr Ritter ®... Mais encore l'extrait de levure enrichie "Marmite" ®, produit anglais à tartiner se trouvant en boutique indienne, ou tout produit "complémenté" ou "supplémenté" en B12. Il n'est jamais inutile d'interroger les fabriquants, d'abord pour être sûr de ce que l'on consomme, ensuite pour leur rappeler notre demande pressante de ne pas utiliser de produits d'origine animale.
Enfin, si vous décelez vraiment une carence (et ce, je le répète, quelque soit votre régime...), il existe des compléments sous forme de comprimés ou d'ampoules. La vitamine B12 Gerda ® est végétalienne et remboursée par la Sécurité sociale. Il est remarquable qu'elle prévoit un traitement d'attaque par voie injectable intramusculaire pour les déficits dûs à un défaut d'absorption, et seulement un traitement par voie orale pour les "végétaliens stricts depuis plus de quatre ans" s'ils souffrent d'anémie. Ne nous effrayons donc pas outre mesure des promesses alarmistes que les carnivores nous prodiguent généreusement; recommandons-leur plutôt de veiller aussi à leur propre régime...
Femmes enceintes, allaitantes et nourrissons
Il est tout à fait possible d'adopter un régime végétalien en état de grossesse ou d'allaitement, ainsi que de nourrir son enfant de façon végétalienne. Toutefois, ce régime nécessite une adaptation rigoureuse à une situation qui demande forcément des apports et des dosages stricts. Le sujet pourrait faire l'objet d'un dossier à part !
On trouve des menus suggérés pendant la grossesse et l'allaitement, le lait végétal recommandé pour les nourrissons ne pouvant être nourris au sein ("Farley's Soya Formula" de Heinz ®, fabriqué au Royaume Uni) ainsi que la nourriture conseillée par tranches d'âge des jeunes enfants dans la brochure très détaillée de l'association AVIS (Association Végétarienne et Végétalienne d'Informations). Cette brochure peut être demandée à leur contact postal : Canal Sud, AVIS, 40 rue Alfred Duméril 31400 Toulouse, ou par internet :
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